KAWAGUCHI Shigeo
Studies in THE PHILOSOPHY OF RELIGION, 22(22) 81-93, 2005 Peer-reviewed
Le pari de Pascal est-il logiquement irréprochable? N’y a-t-il pas un 《sophisme》 caché dans des données du calcul?<br>
Dans le pari pascalien, différent des autres jeux ordinaires et raisonnables, le sacrifice du gage est irrévocable : le paradis de Pascal ne nous rendra pas les plaisirs auxquels nous aurons renoncé ici-bas : il donnera plus et mieux sans doute, mais il donnera autre chose. La difficulté renvoie donc en définitive à ceci que l’identité présumée entre l’agent du pari (en ce monde) et le preneur du gain (au-delà) reste seulement problématique. S’il en est ainsi, peut-on encore insister que ce pari mérite d’être parié? Le renoncement au moi qu’exige le pari se distingue-t-il du simple suicide? Y a-t-il au moins la quelque possibilité réelle pour l’existence et l’identité de notre béatitude? Et, même s’il y en a, sous quel genre peut se reconnaître cette possibilité, dans la mesure où un tel genre doit être, par définition, si exceptionnel qu’il soit partagé dans les deux dimensions tout à fait hétérogènes? <br>
Lachelier indique qu’ 《il y a dans notre conscience un élément singulier, difficile à définir, moitié fait, moitié idée : c’est ce qu’on peut appeler à peu près indifféremment raison ou liberté》. Évidemment il n’y a là toujours aucune preuve de la réalité d’un avenir ultra-terrestre : il est possible que nos facultés supérieures soient ici-bas dans un état d’attente et d’inutilité provisoire, comme les organes de la respiration pendant la vie intra-utérine ; pourtant il est possible aussi qu’il ne doive jamais y avoir pour nous, ni bien intelligible, ni intuition intellectuelle. Mais sous ce genre singulier et exceptionnel, c’est-à-dire liberté ou raison, qui n’est pas l’humanité au sens de l’espèce biologique, s’atteste au moins réellement une certaine capacité éthique et ontologique d’un acte libre, en sacrifiant le moi, du pouvoir parier le pari. La liberté précède, comme Kant a bien vu, nécessairement et inévitablement le 《postulat de la raison pratique》.